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Tandis que nous sommes, devoir patriotique oblige, en train de critiquer notre « monarchie républicaine » et son « souverain », certains pays font face à de réels problèmes. Ne vous inquiétez pas pour Emmanuel Macron, il sera, par coutume, évincé en 2022. En revanche, au Brésil, l’enfer pourrait quant à lui véritablement débuter. Et celui-ci ne ressemblera ni à l’affaire Benalla ni à l’incapacité de mener à bien un remaniement gouvernemental. Non, cet enfer sera bien plus réel, sombre et sinistre.

Le 7 octobre dernier se tenait le premier tour de l’élection présidentielle brésilienne. Ce que l’on croyait impossible de la part d’un pays qui trente trois ans plutôt était encore sous un régime dictatorial s’est produit : fort de l’inéligibilité de l’ancien président Luiz Inácio Lula da Silva, condamné à 12 ans de prison pour « corruption passive » et « blanchiment d’argent », le candidat d’extrême droite Jair Bolsonaro est arrivé largement en tête avec 46 % des suffrages et s’érige comme le grand favori du second tour. Son principal opposant, Fernando Haddad du Parti des Travailleurs, n’est autre qu’un ancien protégé de Lula et peine à nettoyer l’image d’homme corrompu qui lui est, à tort, attribuée. Car les brésiliens associent à la gauche à Luiz Inácio Lula da Silva et ce dernier à la corruption. Ainsi, la gauche est corrompue donc Haddad est lui aussi corrompu.

Le Brésil vit une profonde crise identitaire. Plongé dans une pauvreté qui ne cesse d’accroître en raison d’une politique inefficace, une insécurité omniprésente et une corruption devenue synonyme de politique, le peuple n’a plus confiance en la gauche, qu’il identifie comme corrompue et avide de pouvoir. De fait, sinon par stupidité du moins par manque de réflexion, il s’oriente naïvement vers un autre parti car il ne désire qu’une chose : du changement. C’est le vœu intrinsèque de chaque citoyen. Ainsi, les électeurs, lorsqu’ils ne sont pas sous l’influence de l’Église ou de l’Armée, ne votent pas pour un candidat qui affirme explicitement que ses fils n’épouseront jamais de femmes noires car ils sont bien élevés, qu’il est nécessaire que les femmes touchent un salaire inférieur à celui des hommes car elles peuvent tomber enceinte ou encore que « l’erreur de la dictature a été de torturer sans tuer ». Non, ils ne votent pas pour un candidat marqué par des dérapages racistes, violents, misogynes et homophobes mais pour un candidat non corrompu.

Bolsonaro a d’ores et déjà remporté l’élection, qu’il termine premier au second tour ou non, car il a pris en otage les citoyens brésiliens et les a plongés dans une amnésie totale : ils ne savent plus pourquoi ils votent. La démocratie n’est pas éternelle et l’extrême droite s’affirme progressivement à travers le monde mais Bolsonaro est le seul non-corrompu alors il est légitime. Telle est la réflexion de nombreux brésiliens.

Chers citoyens brésiliens, oui, la situation, votre situation, doit changer. Oui, il est inadmissible que vous perdiez vos maisons, vos emplois et vos proches. Oui, le Brésil doit changer. Mais lorsque l’oppression toque à votre porte, il ne faut pas l’accueillir, il faut la combattre. Lorsque la peur survient, il faut la surmonter. Et lorsque l’ennemi de la république se présente, il ne faut pas voter pour lui. « Una mattina mi son svegliato, e ho trovato l’invasor… »

M.S.